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Camp de base de l’Annapurna

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Jour 14: De Tatopani à Sikha

J14

La mission de la matinée: trouver un bâton de remplacement et refaire le plein de nourriture pour la seconde partie du trek. Nous négocions une contrefaçon de bâton de la marque Leki…sans conviction.

Nous reprenons la route. Seuls cette fois. Nous remontons une vallée transversale au milieu des cultures en terrasse. Dans cette vallée, les villages sont complètement différents de ceux d’avant le col. Les moulins à prières, les stupas, les drapeaux multicolores ont disparu. Nous croisons des femmes habillées en sari et portant le point rouge au front. Ici, les habitants sont de confession hindouiste. Nous avons définitivement perdu les paysages de Tintin au Tibet.

 

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Le chemin consiste en une série d’escaliers qui traversent des villages. Nous voyons de nouveau de la vie dans les champs, des poules et des vaches au milieu des chemins, des tracteurs qui “liftent” des gens dans leur benne, des petits vieux qui nous lancent de retentissants Namasté. Ca change des trois derniers jours de marche.

Fatigue oblige, nous faisons volontairement une étape courte. Après trois heures de marche, nous jetons notre dévolu sur une petite auberge familiale déserte. Le maitre de maison a adopté un chevreau noir et blanc âgé d’un mois.

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La petite chèvre le suit partout même quand il monte à l’étage pour faire visiter la chambre à Nicolas. Depuis le début du voyage, nous avons fait l’expérience suivante: une mascotte dans un foyer est souvent le signe que la maison est bonne. Nous serons bien ici. Le diner et la chambre douillette viennent confirmer notre intuition.

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Photos du jour.

Jour 15: de Sikha à Gorephani

J15

Dès notre réveil, l’orage menace. Nous sommes moyennement motivés pour repartir. Mais la saucée ne se confirmant pas, nous refaisons nos sacs.

En attendant notre petit-déjeuner, nous constatons que notre chevreau de la veille a deux compagnons. Un autre chevreau identique et une petite chèvre blanche. Ca saute partout, ça se course sur le faîte des murs en pierres et sur les toits des maisons, ça met son nez partout y compris dans le sac des porteurs qui se reposent.

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Nous quittons notre auberge, un petit pincement au coeur. L’orage se confirme après une heure de marche. Nous nous abritons dans une auberge. René, un Allemand, a fait de même. Le courant passe tout de suite. Un morceau de fromage de yak et un citron chaud plus tard, nous repartons à trois sur les escaliers glissants vers Ghorepani. Une brume épaisse bouche la vue. Nous atteignons Ghorepani alors que la pluie recommence à tomber. Nous passons la soirée à discuter autour du poêle, sous les layettes du bébé de la maison et nos chaussettes en train de sécher.

Photos du jour.

Jour 16: de Ghorepani à Tadapani

J16

René nous accompagne sur cette étape. Nous ne restons jamais longtemps seuls sur ce trek et c’est bien comme ça. Nous évoluons aujourd’hui dans des paysages verdoyants. Nous traversons des forêts de rhododendrons. On devine aux branches couvertes de lichen que les arbres sont très vieux. Malheureusement, nous arrivons à la fin de la période de floraison. Cependant, des retardataires affichent ça et là leurs magnifiques couleurs rose et rouge. Le rhododendron, c’est la fleur du Népal.

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Nicolas et René parlent photo, appareil, objectif, filtre, carte mémoire, logiciel de traitement d’images… Depuis le début du voyage, je ne compte plus les heures de palabre sur le sujet.

Nous passons le col des Rhododendrons et entamons une longue descente vers Tadapani. C’est un peu l’autoroute, car ce tronçon est aussi arpenté par les randonneurs du trek de Poon Hill, une marche de trois jours qui attire bus de Chinois et familles avec enfants.

Nous nous arrêtons dans une forêt pour préparer notre soupe. Un petit cheval, que nous n’avions pas vu en arrivant, est couché non loin de la. Il n’a pas l’air en forme. Je lui donne des biscuits à la noix de coco. Il se relève immédiatement, un vrai comédien. Du coup, il zieute sérieusement notre velouté de lentilles en préparation.

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Il se rapproche et tente d’inspecter le sac de Nicolas. Il grignote les sangles et les attaches On est bien tenté de lui mettre nos deux sacs sur le dos. On le menace aussi de le transformer en tartare…en vain. A la fin du déjeuner, nous lui accordons tout de même quelques gâteaux supplémentaires.

Nous reprenons la route. Nous sommes bientôt rejoints par un chien roux qui nous accompagne jusqu’à notre destination. Comme tous les chiens sympathiques que nous croisons, nous le baptisons Pedro. Sur le chemin, il s’arrête régulièrement pour observer les environs. On s’arrête aussi pour voir ce qui attire son attention. Cela nous permet de repérer des singes dans les arbres. Ils sont gris avec une tête blanche et possèdent une immense queue. Ils sont très discrets et se confondent avec leur environnement. Presque impossible à voir. Merci Pedro !

Nous arrivons sous la pluie à Tadapani, choisissons une auberge accueillante et passons une bonne soirée à parler de tout et n’importe quoi.

Seule ombre au tableau, la météo qui est maussade depuis deux jours. Nous sommes entourés de magnifiques sommets, parait-il. Nous n’en voyons la pointe d’aucun depuis que nous avons changé de vallée. La perspective du Base Camp dans la purée de pois n’est pas vraiment motivante.

Photos du jour.

Jour 17: de Tadapani à Chomrong

J17

Aujourd’hui, c’est le nouvel an népalais. D’après leur calendrier, nous sommes en 2071. A part les Bonne Année de l’aubergiste et de ses enfants, on ne remarque aucune manifestation particulière liées à l’événement.

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L’étape de la journée consiste en une succession de descentes et de montées de plusieurs centaines de mètres dans d’immenses escaliers. On déteste l’idée de descendre pour devoir remonter ensuite. La promenade se transforme en épopée sysiphienne.

Notre ami Pedro, le chien, nous attend, René, Nicolas et moi, à la sortie de l’auberge. Nous sommes pourtant les derniers à en sortir. Allez savoir pourquoi, il est couché là sur la terrasse de notre guest-house. Alors que nous commençons à descendre les marches, il se lève, s’étire et nous dépasse pour nous montrer le chemin. Il nous accompagne fidèlement pendant plusieurs kilomètres de descente. Sympa Pedro !

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Nous traversons des paysages de terrasses cultivées de blé, descendons dans la vallée pour traverser un pont tout en bas, avant de remonter dans les villages, tout en haut. Nous arrivons dans le village de Chomrong situé à la croisée de deux vallées. L’une mène à l’Annapurna Sud, l’autre à l’Annapurna I. Malheureusement, nous ne voyons ni l’un ni l’autre, cachés dans les nuages.

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A Chomrong, nous nous réfugions dans une “German Bakery” qui expose de très tentantes parts de forêt noire et de gâteau au chocolat. Apparemment, au Népal, l’Allemagne est la référence en terme de pâtisseries et de viennoiseries. Avec René, nous vérifions si la boulangerie népalaise tient ses promesses de goût outre-Rhin. Madeleine de Proust en altitude. C’est pas mal du tout !

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La “German Bakery” se révèle être un véritable repaire de français. Certains sont tout fraichement descendus du camp de base de l’Annapurna I. On prend des infos sur la météo. L’un des Français voyage depuis un an et demi avec sa femme, sa fille de 15 ans et son fils de 7 ans. Intéressant d’écouter son expérience de père de famille voyageur. Le soir, Nicolas se gave de Dal Bat qui implique un refill à volonté. Ventrée de riz, soupe de lentilles et de légumes.

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Photos du jour.

Jour 18: de Chomrong à Dobhan

J18

Ce matin, il fait beau. Nous voyons de la terrasse où nous déjeunons l’Annapurna Sud et le Machhapucchre, aussi nommé “Fishtail”, la queue de poisson, en raison de sa forme évocatrice.

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René doit repartir vers la vallée. Nous nous donnons rendez-vous pour l’ascension d’une autre montagne, plus modeste mais non moins symbolique pour nous trois: le Zugspitze. Du toit du monde au toit de l’Allemagne !

Nous entamons la descente des terribles escaliers de Chomrong car avant de monter, ici, il faut descendre. Plus de 2200 marches irrégulières. Une torture pour les mollets et le moral. Le relief népalais est désespérant.

Nepali flat: a bit up, a bit down.

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Après le village de Sinuwa, un panneau nous indique que nous entrons dans le sanctuaire des Annapurnas. Nous pénétrons, en effet, dans une vallée encaissée qui sera le décor de notre marche pour les quatre prochains jours. Elle se termine par un angle droit qui mène au camp de base de l’Annapurna I (ABC dans le jargon des trekkers pour “Annapurna Base Camp”).

Le panneau de Sinuwa précise qu’en raison de vieilles croyances, il est interdit de consommer de la viande de poulet, de porc ou de bovin dans cette vallée. Heureusement, nous avons des soupes aux champignons et des nouilles chinoises aux légumes. Un peu plus loin, un autre panneau indique qu’il est aussi interdit de déféquer en dehors des toilettes des lodges et de cracher. Là, on touche à un point sensible. Les Népalais sont des champions du crachat. A longueur de journée, nous sommes bercés par le doux bruit du raclement de gorge qui se termine par un gros molard bien visqueux par terre. Ca va vraiment être dur pour eux !

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La vallée se révèle être sinistre. Le temps qui se détériore en fin de matinée ajoute à l’ambiance triste. Nous atteignons notre objectif de la journée. La douche chaude, désormais payante, est la bienvenue.

Photos du jour.

Jour 19: de Dobhan à Deurali

J19

Petite journée aujourd’hui. La plupart des trekkers tracent pour être en deux jours à ABC. La plupart des trekkers en sont à leur cinquième jour de grimpette. Nous, cela fait dix-neuf jours que nous sommes sur les chemins et la fatigue se fait sentir. Comme pour le GR20, nous constatons qu’avec la marche, nos muscles se sont renforcés mais que nos articulations se sont affaiblies. Nos genoux et chevilles commencent à se révolter du traitement qu’on leur fait subir. Les massages au baume du tigre n’apportent qu’un soulagement temporaire.

Deurali est à trois heures de marche. Depuis hier, nous traversons des villages qui n’en sont pas. Sinuwa, Bamboo, Dobhan, Himalaya, Deurali sont des regroupements de 3–4 lodges. Juste de quoi accueillir les trekkers pour une nuit. Chambrettes, douche, toilettes, salle commune pour prendre les repas et mini-magasin avec produits de première nécessité.

Nous effectuons nos trois heures de marche au milieu de groupes de porteurs et de porteuses. Ces gens-là forcent l’admiration. Ils transportent sur leur dos une cinquantaine de kilos de tout et n’importe quoi pour ravitailler les lodges. Cela va des cartons de Pringles aux matériaux de construction, en passant par les pommes de terre, la bouteille de gaz qui permet de chauffer l’eau de la douche. Pas étonnant qu’elle soit payante !

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Les porteurs qui approvisionnent les lodges se servent de grandes hottes en osier pour transporter leurs marchandises. La hotte est reliée au porteur par une courroie qui se pose sur le front. Il y a aussi les porteurs des sacs de trekkers qui sont partis en agence. Eux aussi se servent de leur front pour supporter le poids des sacs, que ces derniers soit équipés de bretelles ou pas. Tout le poids repose sur les cervicales et le crâne. Chez les porteurs âgés, la courroie a laissé un renfoncement dans le front. La plupart sont mal chaussés de tongs, de sandales en pneu ou de petites chaussures en toile. Et ce par tous les temps.

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Ca nous fait mal de les voir porter pour nous, pour notre confort, pour satisfaire notre curiosité de voir les sommets de près. D’aucuns vous diront qu’ils gagnent leur vie comme ça et que tout le monde est gagnant. Je n’aimerais pas voir une radiographie de leurs cervicales à 40 ans. Notre maigre consolation est d’avoir fait le choix de porter nous-même nos sacs. On en bave tous les jours mais on avance, au moins, la conscience un peu allégée.

Nous arrivons à Deurali en fin de matinée. La pluie commence à s’installer. Sans relâchement, elle pourrira la marche de nombreux trekkers et se transformera même en tempête de neige pendant que nous passons ces heures à écrire bien au chaud.

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Photos du jour.

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